Depuis le printemps 2011, le Loup (Canis lupus) est de retour en Lorraine. La situation de l’espèce évolue, le GEML* et le Réseau local FERUS « Massif des Vosges » proposent donc de faire ici un point sur la situation.
Les évènements depuis le printemps 2011
Au printemps 2011, quelques témoignages, un cliché réalisé avec un piège photographique et des attaques sur des troupeaux d’ovins dans les Vosges, laissent supposer la présence d’un loup sur le Massif vosgien. Dans un premier temps, sans nier la possibilité du loup, il était nécessaire de rester prudent, puisque certains chiens ressemblent fortement au loup, et que les attaques de moutons peuvent être l’œuvre de chiens également. Les expertises de l’ONCFS montrent finalement qu’il s’agit bien d’attaques « typée Loup ».
En juillet 2011, un cliché, réalisé avec un piège photographique, montre bien un loup, un mâle. Les attaques sur les troupeaux domestiques se poursuivent. Malgré le fait qu’à chaque attaque, plusieurs moutons ou brebis sont tués, cela ne renseigne pas sur le nombre de loups. En effet, la présence d’un nombre important de proies faciles d’accès entraîne un réflexe d’attaque chez les carnivores, appelé « sur-chasse » ou « over-killing ». Pour appréhender le nombre d’individus ayant participé à l’attaque, il faut regarder la quantité de viande consommée. D’après les expertises, la consommation est assez faible (environ 5 Kg en moyenne), ce qui correspond à la ration d’un loup.
En janvier 2012, une piste d’au moins deux loups est suivie dans la neige, toujours sur le Massif vosgien. Le loup se déplace en effet de manière rectiligne, contrairement au chien qui zigzague beaucoup. De plus, lorsque plusieurs loups se déplacent ensemble, chaque loup met ses pattes dans les empreintes de celui qui le précède, ce qui ne forme qu’une seule piste. De temps à autre, un loup peut quitter cette piste commune, ce qui forme un « aiguillage » et ainsi renseigner sur la présence de plusieurs individus. Un deuxième loup, au moins, est donc arrivé pendant l’hiver, vraisemblablement au cours de décembre.
A partir d’avril 2012, des attaques sur des troupeaux domestiques d’ovins ont lieu sur le secteur de Grand (88), à plus de 100 km du secteur où étaient présents les loups jusqu’alors. On peut supposer qu’il s’agit d’un jeune individu, encore inexpérimenté dans la chasse, puisque l’over-killing est fort. Il s’agirait donc d’un troisième loup, arrivé récemment. Sur le Massif vosgien, des attaques ont encore eu lieu dans le secteur de la Bresse (88), et la consommation de viande laisserait penser que les deux individus sont encore ensemble.
* GEML : Le Groupe d’Etude des Mammifères de Lorraine (GEML), composé notamment de scientifiques et naturalistes, est une association qui œuvre depuis près de 30 ans pour une meilleure connaissance et protection des mammifères sauvages en Lorraine. Site Internet : www.geml.fr
* GEML : Le Groupe d’Etude des Mammifères de Lorraine (GEML), composé notamment de scientifiques et naturalistes, est une association qui œuvre depuis près de 30 ans pour une meilleure connaissance et protection des mammifères sauvages en Lorraine. Site Internet : www.geml.fr
D’où viennent-ils ?
Le Loup a fait son retour en France en 1992 dans le Massif du Mercantour, de manière naturelle, à partir des populations italiennes, protégées à partir des années 1970.
La dispersion du Loup se fait « par bond », c’est-à-dire que les individus quittant une meute ne vont pas forcément s’établir sur le territoire vacant le plus proche. Ils peuvent parcourir de longues distances, pouvant aller jusqu’à plusieurs centaines de kilomètres, avant de s’établir.
Dans un premier temps, l’espèce a progressé vers le Nord en s’installant dans les zones de faible densité de population humaine, c’est-à-dire principalement les montagnes. C’est donc logiquement qu’elle a atteint les Alpes et que sa progression se poursuit vers les massifs montagneux de France et ailleurs en Europe, dont les Vosges. Rappelons que les meutes de loups connues les plus proches se situent à environ 250 km des Vosges, quelques jours à pattes de loup…
En résumé
Actuellement, au moins trois loups sont présents dans les Vosges, deux à l’Est, sur le secteur de la Bresse et un à l’Ouest, sur le secteur de Grand. Leur arrivée sur le département s’est échelonnée sur un an, entre début 2011 et le printemps 2012. Même si le fait que deux loups chassant ensemble sur le massif peut laisser penser à une meute (au minimum un couple qui établit un territoire et qui se reproduit, d’après le Plan d’action pour la conservation du Loup en Europe, Conseil de l’Europe, 2003), il manque encore de nombreux éléments pour que cela soit une certitude. La colonisation de la Lorraine par le Loup en est à son début. La situation n’est pas figée et il est certain qu’elle évoluera dans les semaines, mois et années à venir, apportant de nouveaux éléments, qui permettront une meilleure connaissance de l’espèce dans la région. En attendant, il est important de s’en tenir aux faits avérés et de ne pas se perdre dans les rumeurs et autres théories non étayées. A suivre…
* GEML : Le Groupe d’Etude des Mammifères de Lorraine (GEML), composé notamment de scientifiques et naturalistes, est une association qui œuvre depuis près de 30 ans pour une meilleure connaissance et protection des mammifères sauvages en Lorraine. Site Internet : www.geml.fr
7 commentaires sur “Trois loups en Lorraine !”
Luc a écrit:
« Alors il faut commencer avec les médias. Si les médias changent leur point de vue, les gens vont le faire aussi. »
Ou l’inverse?
Entièrement d’accord avec l’intervention de » l’âme du loup » . On rejoint là, la même problématique de l’ours et des troupeaux en Hautes-Pyrénées qui errent sans surveillance et ne sont pas rentrés la nuit . Comme si un éleveur de volailles décidait de laisser ses poules vagabonder librement jour et nuit dans la nature , sans clôture ni surveillance malgré la présence des renards et des fouines alentours ! Inconcevable !…
Par ailleurs , les mêmes arguments sévissent dans les Alpes et dans les Pyrénées sur la peur de l’ours et du loup qui feraient fuir les touristes et pourraient attaquer les randonneurs . C’est absolument ridicule et sans fondement ! Surtout quand on pense au nombre de morts et de blessés que font chaque année les chiens en France … Même si un accident est toujours possible ours et loup sont encore loin du compte par rapport au danger que représentent les chiens dans notre civilisation !
Les grands prédateurs peuvent avoir un intérêt touristique majeur et promouvoir toute une économie comme on le voit dans d’autres pays ( article de Férus sur la Finlande ). Economie florissante et écologique , par exemple tout près de chez nous, en Espagne dans les Asturies et les Cantabriques où se côtoient et cohabitent ours, loups , pastoralisme , touristes et chasseurs . Ce territoire étant il faut le rappeler classé pour son excellence et sa qualité naturelle au patrimoine mondial de la biosphère par l’Unesco .
Alors il faut commencer avec les médias. Si les médias changent leur point de vue, les gens vont le faire aussi.
les éleveurs et les chasseurs sont des lobbies. Et ce sont toujours eux que l’on écoute. Jamais les informations télévisées ne mettent en avant le rôle écologique du loup.. C’est un concurrent pour le monde cynégétique.
Quelle profession est plus suventionnée que celle de l’élevage ? Distribue-t-on des subsides aux commerçants et artisans pour les maintenir en activité artificiellement ?
Tout à fait d’accord avec ce message. 🙂
Bonjour,
Tout en soutenant entièrement vos actions respectives , je pense qu’il serait temps de passer à la vitesse supérieure et de dépasser maintenant le stade des études et de la pédagogie sans effet. Il est clair que, sous la pression des fédérations agricoles, le loup est condamné à mort et ceci d’ autant plus facilement qu’ aucune action concertée n’est menée pour s’ y opposer. Ils sont bien seuls ceux qui dénoncent, à juste titre, le coût faramineux des subventions distribuées à la filière ovine pour maintenir artificiellement, dans ce pays traditionnellement peu consommateur de mouton, une population de 8 millions d’ animaux alors que depuis 10 ans les cours de cette viande ne cessent de chuter! Ils sont bien seuls ceux qui font la différence entre le vrai berger , acteur essentiel du pastoralisme , et l’ éleveur qui passe sa soirée devant la télévision quand son troupeau est laissé sans surveillance dans un parc à plusieurs kilomètre de là !
Le vrai problème ne vient pas du retour du loup dans nos massifs mais de l’omniprésence du mouton sur ces mêmes territoires et surtout de son mode d’ élevage et de son manque de surveillance.
Il est temps de sensibiliser sérieusement la population à ce problème et d’ adopter, sur le sujet, un discours un peu plus » agressif » en légitimant par leur rôle écologique le retour des grands prédateurs dans nos derniers grands massifs et en condamnant l’ impact négatif sur l’ environnement de toute cette surpopulation ovine . Les réseaux sociaux ont déjà montré , en d’ autres occasions, leur formidable capacité à mobiliser. Pourquoi ne pas tenter cette voie pour vous faire entendre , car encore ce matin sur France Info c’ est à un éleveur qu’ on donnait la parole pour justifier l’ abattage d’ une louve en lui faisant dire qu’ un jour le loup pourrait attaquer l’ homme !
Avec mes remerciements pour m’ avoir permis cette intervention et ma sincère gratitude pour votre engagement.
l’ âme du loup . Nouvel adhérent à FERUS
Encore une région ou le loup réapparait !!!
Petit à petit le loup recolonnise discrètement ses anciens territoires.
Espérons que les « antis » laissent poursuivre cette re-naturalisation animale de notre milieu montagnard et campagnard !!!