La saison des amours
A l’instar de nombreux félins, le lynx est un animal solitaire, mâles et femelles ne se rencontrant volontairement qu’à la période du rut. Celui-ci a lieu de fin février à début avril, en mars la plupart des cas. Dès le mois de décembre, mâles et femelles se manifestent un intérêt réciproque, se frottant la tête l’un contre l’autre, se flairant mutuellement la zone génito-anale et favorisant les contacts corporels (léchage…). Des comportements qui se poursuivront quelques semaines, jusqu’à l’époque du rut.
Pendant le rut, le marquage urinaire est d’avantage fréquent, chez le mâle comme chez la femelle. L’oestrus, période durant laquelle la femelle est réceptive, dure en général 2 jours. Pendant l’accouplement, le mâle saisit la femelle par la nuque : il se termine après une copulation de 1 à 3 minutes (Stehlik, 1980). Après le rut, le mâle laissera à la femelle seule le soin d’élever les jeunes.
Maturité sexuelle : vers 21 mois chez la femelle et 33 mois chez le mâle.
La reproduction peut avoir lieu tous les ans mais ce n’est pas systématique. Dans le Jura, 3 femelles ont été suivies pendant 2 saisons de reproduction chacune : la présence de jeunes a été notée 1 année sur 2 (Stahl et Vandel 1998). La reproduction est peut être liée à la densité de lynx et à celle de certaines proies, comme c’est le cas pour le lynx du Canada dont le cycle de reproduction est corrélé avec le cycle du lièvre.
Les jeunes
Après une gestation de 10 semaines, la femelle met bas 1 à 4 petits dans un abri naturel (souche d’un arbre, buisson épais…). Dans le Jura comme en Norvège, les naissances ont lieu fin-mai / début juin (Kvam 1991 ; Stahl et Vandel 1998), époque à laquelle la nourriture est la plus abondante. Les petits, aveugles, pèsent 250 à 360 grammes chacun, les mâles étant en général plus lourds que les femelles. Leur pelage, déjà plus ou moins tacheté, est de couleur terre (il sera remplacé vers l’âge de 10 semaines par un pelage d’été) ; des petits pinceaux auriculaires sont présents.
A l’âge d’environ 15 jours, leur poids a doublé ; vers la même époque, les yeux s’ouvrent et les canines ont percé (entre 6 et 12 jours).
Vers 20 jours, ils commencent à s’aventurer hors de l’abri et à 1 mois, ils pèsent 800 à 1200 grammes.
Les incisives apparaissent vers 9-29 jours et les prémolaires vers 24-63 jours.
La formule dentaire lactéale est la suivante : I 3/3, C 1/1, P 2/2. Les dents définitives apparaîtront dès le début de l’automne.
Le sevrage commence vers 30-40 jours et se termine vers 75 jours. A la même époque, vers 3 mois, les jeunes réussiront leurs premières tentatives de captures de petites proies. Pendant 6 à 9 semaines, les jeunes lynx resteront près du lieu de naissance, la femelle ne s’éloignant guère pour chasser.
La dispersion. La période de séparation des jeunes d’avec leur mère se situe entre janvier et mi-avril. Toutefois, la majorité des jeunes seront délaissés par leur mère entre fin-mars et mi-avril de leur première année. La plupart des jeunes resteront encore pendant quelques semaines dans le territoire de leur mère avant de le quitter définitivement et de s’établir ailleurs.
La mortalité des jeunes avant la dispersion est élevée, comme chez de nombreuses espèces de félins (puma, tigre, panthère, lynx du Canada, lynx roux) pour lesquelles elle varie de 30 à 60 %. Dans le Jura suisse, 14 jeunes ont été suivis dès leur naissance : 6 seulement étaient encore en vie vers 10 mois, 7 ayant disparu avant et pendant leur premier hiver (Kaczensky 1993, Breitnmoser et al. 1993). A Bialowieza, en Pologne, la mortalité avant dispersion a été évaluée à 50% minimum (Jedrzejewski et al. 1996). La mortalité infantile est probablement liée à la disponibilité en nourriture ; les jeunes de quelques mois peuvent être les victimes des loups, des renards et des aigles.
