Courir après un fantôme. Par Neil Villard.
Article paru dans la Gazette des grands prédateurs n°52 (mai 2014) / dossier spécial piège-photo
Dès les premières neiges de novembre 2013, j’ai commencé comme chaque année depuis trois ans à chercher des indices de présence de lynx dans ma région, dans le canton de Neuchâtel en Suisse. Le but était de prospecter un maximum pour essayer de définir où serait le lynx lors de la période du rut. Je notais alors chaque emplacement intéressant pour aller poser des pièges photos plus tard. Malgré de belles précipitations en début de saison, le reste de l’hiver a été quasiment privé de neige. Le pistage était donc très difficile et j’ai loupé plusieurs grandes opportunités de rencontre. Des amis ou des contacts m’ont donné des infos intéressantes, mais toujours trop tard ou trop loin. Tout le mois de janvier dernier, j’ai posé des pièges photos, je les relevais, les déplaçais, jusqu’à ce qu’enfin l’ombre du félin vienne déclencher un de mes pièges.
Dimanche 26 janvier, je propose à ma fiancée de m’accompagner récupérer un piège que je n’ai pas vérifié depuis trois semaines. C’est un de mes endroits préférés du massif jurassien. En hiver, la neige empêche les promeneurs de venir, car elle rend le terrain vraiment dangereux. Mais surtout, c’est ici que j’ai vu un lynx pour la première fois de ma vie ; c’était en mars 2012, un gros mâle à la robe quasiment rouge. Après 45 minutes de marche, nous arrivons sur place. Le piège est toujours là, c’est déjà ça ! Je mets la carte SD dans mon ordinateur portable et commence à visionner son contenu : un renard, des chamois, un geai, un sanglier, de nouveau un renard, un lynx, une martre… UN LYNX ! Je reviens sur les trois images du lynx, il (en fait c’est elle car il s’avèrera plus tard que c’est une femelle) est passé à 17h45 le lundi d’avant. Vu que je n’ai rien de concret ailleurs, c’est là que je vais placer tous mes espoirs. Du coup, il faut aller récupérer les autres pièges photos car je ne retournerai pas ailleurs une fois ma session de recherche entamée dans ce coin. C’est ainsi que notre petite balade dominicale s’est transformée en 4 heures de marche en raquettes sur les crêtes jurassiennes.
Depuis ce jour-là, commence une longue période d’affûts. Inlassablement, je me rends sur place après le travail, 43 jours quasiment d’affilée. Je passe des après-midi entiers sous des pluies battantes, des vents tempétueux et même un orage en plein mois de février. Les rares fois où des conditions idéales sont là pour le pistage, je laisse mon filet de camouflage pour partir à la recherche du lynx de manière plus active.
Lire la suite en téléchargeant l’article en pdf :
S’abonner à la Gazette des Grands Prédateurs / les anciens numéros !