Le Nouvel Obs a publié un article d’une grande malhonnêteté dans son dernier numéro (n° 2563) : Le gentil petit loup et le grand méchant berger, par François Caviglioli. Choqué qu’un hebdomadaire d’une telle envergure puisse encourager la diffusion de pareilles inepties, et qu’un journaliste discrédite à ce point sa profession en tombant dans la partialité la plus totale, le président de FERUS a réagi en envoyant un courrier à la rédaction du Nouvel Obs.
« Sous un titre accrocheur, Dans la gueule du loup, dans la cadre de la rubrique « Notre époque – biodiversité », vous vous livrez à un réquisitoire anti-loup sous prétexte d’une critique du livre de votre consœur Anne Vallaeys, Le loup est revenu.
Comment est-il possible qu’un journaliste digne de ce nom reprenne ainsi des arguments qui sont pour la plupart erronés, déviés, pernicieux, voire même mensongers, sans même, à l’évidence, une vérification ne serait-ce que minimale ? Ainsi, à vos yeux, Anne Vallaeys a toutes les vertus de celle qui dit la vérité, la seule vérité, « l’initiée », celle qui sait, et vous n’avez même pas pris la peine d’interroger ou seulement de vous renseigner auprès de ceux qui ne pensent pas la même chose. Vos confrères de Marianne, dans un numéro récent, qui faisait lui aussi l’analyse de ce bouquin, ont eu au moins l’élémentaire correction de me donner la parole et une page entière de leur revue où j’ai pu exprimer certaines idées qui vont à l’encontre totale de celles d’Anne Vallaeys. Voilà au moins du vrai journalisme, qui honore le débat contradictoire et nécessaire à l’enrichissement de toute démocratie… Ce n’est visiblement pas ainsi que vous voyez les choses, c’est vraiment regrettable, surtout venant du Nouvel Obs, revue à laquelle je suis abonné depuis des dizaines d’années. Connaissant bien le sujet, cela me laisse de vrais doutes sur tout ce que vous pouvez écrire dans cette revue… et me fait vraiment m’interroger sur la suite de mon abonnement.
Non, nous ne sommes pas dans une nouvelle ère « furieusement écologiste », mais nous prenons simplement en compte la nature qui nous entoure et nous la respectons, comme nous respectons le vivant animal. Le loup, comme l’ours ou le lynx, a le droit de vivre libre, sauvage et en paix. Nos écosystèmes le permettent parfaitement et il y de la place pour tout le monde, élevage et prédateurs. Il suffit seulement de se donner les moyens, qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement financiers, de mettre en oeuvre la cohabitation. Ce qui fonctionne assez bien à l’étranger où les grands prédateurs sont présents, ne devrait-il donc pas fonctionner en France ? Voilà donc, là également, la fameuse « exception française », celle qui fait que ce qui fonctionne ailleurs ne peut pas fonctionner chez nous ! Notre association oeuvre sur le terrain depuis 15 ans en soutien aux éleveurs en zones à loups, notamment dans le Mercantour, et démontre que la cohabitation est possible par notre action d’écobénévolat pastoraLoup.
Alors, bien sûr, c’est tellement plus facile et « vendeur » de dire que le « grand méchant loup est revenu », en prenant comme paroles d’évangile les propos d’Anne Vallaeys. Et puis, c’est tellement mieux de faire peur dans les chaumières en sortant des phrases comme « Les loups vont-ils entrer dans Paris ? ». Dire que le loup a été réintroduit, alors qu’il est revenu naturellement d’Italie, de laisser croire qu’il dévore tous les agneaux alors que le cheptel domestique ne représente pas 10 % de son alimentation et encore parce qu’il est mal protégé, de dire que les loups se risqueront bientôt au cœur des villes pour y déchiqueter des enfants alors que, de mémoire d’homme, on ne relève aucune attaque de loups contre les humains, ce qui est hélas loin d’être le cas de nos chiens, nos bons « toutous » domestiques.
Le combat des éleveurs qui refusent de prendre en compte les données du respect de la vie sauvage qui les entoure est un combat d’arrière-garde et ils le savent. Seuls ceux qui pratiqueront un élevage de qualité et qui se protégeront correctement des prédateurs survivront, les autres disparaîtront, c’est inéluctable. L’opinion publique ne s’y trompe d’ailleurs pas puisque 80 % des citoyens français sont favorables au loup (sondage IFOP / ASPAS-ONE VOICE de fin septembre 2013).
Nous ne sommes pas des « croisés de l’écologie dure partisans d’un retour à une virginité édénique », mais simplement des citoyens soucieux du respect de la vie, aussi bien des grands prédateurs que des troupeaux domestiques dans des écosystèmes respectueux de l’environnement.
Pour finir, la chanson de Serge Reggiani fait allusion à des loups qui portaient un « casque à pointe », bien plus dangereux et votre référence à Alfred de Vigny est bien mal venue à mon avis. Je vous répondrai simplement par une citation d’Elie Wiesel : « Toutes les formes de vie doivent être considérées comme un patrimoine essentiel de l’humanité ».
J F Darmstaedter – président de FERUS »
Lire aussi :
– Emission Vivre avec les loups sur France Inter : notre coup de gueule (octobre 2013)
– Loup : le couac de France 2 (février 2013)
1 commentaire sur “FERUS réagit au piètre article du Nouvel Observateur sur le loup”
[…] Réaction du président de FERUS suite à la publication dans le Nouvel Observateur d'un article sur le loup totalement à charge. […]