Une étude menée en Scandinavie sur les ours bruns révèle que la chasse pourrait avoir un impact négatif sur la reproduction de l’espèce. Au delà du nombre d’animaux tués, l’étude démontre que la chasse peut altérer les chances de reproduction des plantigrades et ce à cause d’une modification de leur comportement lors de leur recherche de nourriture.
Le contexte
L’étude a été menée en Suède et en Norvège où la chasse à l’ours est autorisée. En effet, la Scandinavie abrite 3.300 ours et chaque année, des quotas de chasse sont délivrés, permettant d’abattre entre 45 et 75 plantigrades (cela dépend des années). En général, cette chasse se débute vers la fin août et se termine environ deux mois plus tard, quand le quota est atteint.
L’étude
– L’étude a été menée par une équipe de chercheurs de l’Université Norvégienne des Sciences de la Vie pilotée par Andres Ortiz et fera l’objet d’une publication dans le numéro d’août de la revue Biological Conservation,
– Elle s’est échelonnée pendant sept années consécutives, de 2003 à 2010,
– 78 ours ont été équipés de colliers GPS destinés à suivre leurs déplacements, en particulier pendant les deux semaines qui précèdent et les deux semaines qui suivent l’ouverture de la chasse,
– La majorité des ours équipés étaient des adultes solitaires (mâles et femelles), un petit nombre étaient des femelles suitées.
Les résultats
L’étude montre qu’avant l’ouverture de la chasse, les ours sortent plus souvent en journée. Ils consacrent près de 12 heures par jour à la quête de nourriture et dorment lorsqu’il fait nuit. Lorsque la chasse débute, avec son cortège de coups de feu et d’aboiements de chiens, le comportement des ours s’inverse : ils se terrent durant la journée et ne sortent que la nuit, plus brièvement. Le comportement des femelles ayant des petits n’est pas aussi nettement modifié mais cela s’explique par le fait qu’elles sont généralement installées dans des zones très reculées et difficiles d’accès pour l’homme.
Conclusions de l’étude
La chasse à l’ours survient en août/septembre/octobre, période très spécifique durant laquelle les ours doivent considérablement intensifier leur activité alimentaire (= période d’hyperphagie) afin d’accumuler les graisses nécessaires pour traverser l’hiver. En Scandinavie, où les hivers sont longs et rigoureux, les femelles se doivent d’augmenter leur masse corporelle de 65% durant cette période!
Le régime alimentaire des ours se constitue essentiellement de baies, de glands et de noisettes et le fait que les ours procèdent à la recherche de nourriture la nuit altère leur vue et les empêche de distinguer les fruits mûrs, plus riches en éléments nutritifs. De ce fait, si l’augmentation de la masse corporelle des femelles est limitée, cela compromet leurs chances de mener à terme leur portée.
Les chercheurs demandent donc à ce que la chasse à l’ours n’ait pas lieu lors de cette période cruciale qu’est l’hyperphagie et que les forêts riches en glands et les zones où il y a beaucoup de baies soient interdites à la chasse.
Source : « Quand les ours sont stressés », Le Figaro
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