A l’instar du loup, l’ours est également un animal au régime alimentaire opportuniste, adaptant sa nutrition aux ressources locales, celles nécessitant un minimum d’énergie pour un maximum de quantité. Chasseur ou charognard, omnivore ou carnivore, fouilleur de poubelles ou pêcheur de poissons, son alimentation varie selon les saisons et selon les régions.
L’ours herbivore
D’après les crottes analysées, les végétaux composent environ ¾ du régime alimentaire de l’ours : fruits, graines, racines, tubercules, bulbes et graminées forment en effet l’essentiel de son alimentation ; les baies représentent même plus de 30 % des restes retrouvés dans les excréments d’ours (Berducou 1982). En Amérique du Nord, ce sont plus de 200 espèces végétales qui sont couramment ingérées par l’ours (Le Franc et al. 1987). Dans les Pyrénées, une trentaine de végétaux sont consommés par l’ours : certains le sont occasionnellement (scille, ortie, seille printanière, fougère aigle) et d’autres communément (myrtille, muguette …). L’ours pyrénéen semble éviter la prèle, la berce et le sainfoin tandis que les ours habitant les Rocheuses et les Abruzzes s’en nourrissent volontiers. Si les airelles et le raisin d’ours sont peu prisés, ils deviennent essentiels lors de pénurie de nourriture. En Yougoslavie, le cormier et l’Arum maculé nourrissent souvent les ours yougoslaves. Côté fruits, l’ours se régale de châtaignes, cerises, prunes et pommiers. Grand amateur de miel, il est surnommé « Medvjed » (« mangeur de miel ») par les russes ; malheureusement, l’ours n’hésite pas à détruire les ruches des apiculteurs pour savourer ce mets de choix.
L’ours carnivore
Selon les régions, les ours sont plus ou moins prédateurs. En effet, les ours scandinaves et himalayens semblent plus carnivores que les ours français. D’après Berducou, l’alimentation de l’ours pyrénéen se compose ainsi : 36% de fruits et de baies, 39% d’autres végétaux, 7.5% de bétail, 8.1% d’animaux sauvages (mammifères, poissons) et 9.4% d’insectes. Dans les Abruzzes, les restes de mammifères représentent 15% (Zunino et al. 1972), 10 à 15% dans le Caucase et en Sibérie (Vereschagin 1976), 9.3% dans le sud de l’Oural (Sarafutdinov et Korotkov 1976) et 9.8% dans le Parc National de Yellowstone (Mealey 1977). Dans les Rocheuses canadiennes, l’ours chasse l’élan et le wapiti, les écureuils terrestres, les marmottes et les mouflons. Par contre, dans le Parc National de Denali, Alaska, les ours semblent se satisfaire de végétaux et de charognes. D’ailleurs, tous les ours se montrent volontiers charognards. Lorsqu’il chasse, l’ours préférera s’en prendre aux animaux jeunes, malades, vieux ou blessés, plus vulnérables. Ainsi, en 1981, dans les Pyrénées centrales, il a su profiter d’une épidémie de kérato-conjonctivite chez les isards (chamois pyrénéens) : la présence des restes de cette proie fut alors fréquente dans les crottes d’ours. Le sanglier est en général évité.
Les attaques sur le bétail (ovins essentiellement) sont souvent le fait de mêmes individus. Toutefois, le nombre des attaques est influencé également par les conditions météorologiques et par l’abondance ou la rareté de la nourriture. Dans les Pyrénées Occidentales, la majorité des attaques a lieu la nuit (88%), généralement d’août à septembre ; mais elles peuvent également survenir de mars à décembre (Buffière et al. 1988 ; Camarra 1988). Dans les Pyrénées centrales, Parde (1984) situe la majorité des attaques de juin à septembre.
Les insectes, à l’état larvaire ou adulte, sont également importants pour l’ours et représentent 10.4% du régime alimentaire dans les Carpates (Slobodyan 1974) et 22.4% dans le sud de l’Oural (Korotkov 1976).
L’ours se révèle aussi pêcheur, notamment en Amérique du Nord où il surprend en été les saumons remontant les rivières. Il se nourrit de grenouilles également.
Variations selon les saisons
L’alimentation de l’ours varie selon les saisons et selon les ressources disponibles. Si, tout au long de l’année, l’ours se nourrit de tout, seuls quelques types d’aliments sont en fait consommés dans une période donnée. Selon Fabbri (1988), 90% des crottes d’ours des Abruzzes analysés contenaient un maximum de 3 aliments (30% des crottes ne contenaient qu’un aliment ; 30 % en contenaient 2). Au printemps, lorsque l’ours se réveille, il se nourrit de viande (animaux chassés ou consommés en tant que charognes), pille les réserves de tubercules emmagasinées par certains rongeurs (campagnols) ; il peut également brouter les pousses de graminées.
A la fin du printemps et en été, l’ours se nourrit d’insectes vivant en colonie (fourmis, abeilles) ; jusqu’en automne, guêpes et abeilles seront dévorées.
Dés le début de l’automne, l’ours consommera baies et fruits secs qui lui apporteront glucides et lipides, indispensables au sommeil hivernal.
Les végétaux herbacés seront mangés pendant leur croissance (printemps et été).
Un ours adulte mange 10 à 16 kilos de nourriture par jour.