FERUS réagit aux « Crocs de la colère », reportage diffusé le jeudi 23 février 2006 sur France 2 dans le cadre de l’émission Envoyé Spécial.
Une fois encore, quand les médias parlent de la problématique loup / élevage, le grand spectacle est de rigueur. Images et métaphores fusent : « c’est l’odeur qui vous guide. Celle des charognes », « La mort pourrit sur le granit », « tuer, il a ça dans le sang » … ; et d’assister à la bastonnade d’un groupe de « militants écologistes » par un éleveur, filmé avec complaisance. D’ailleurs, « être un défenseur du loup, c’est dans l’air du temps » : les amis du loup ne régiraient-ils donc qu’à un certain effet de mode et non pas à la prise de conscience que l’animal fait tout simplement parti de la biodiversité et du patrimoine naturel à sauvegarder ? On s’étonnera également que le loup soit si souvent appelé « la Bête ».
FERUS regrette que certaines réalités ne soient pas développées voire tout simplement abordées, ce qui fausse le débat.
Des erreurs d’appréciation sont à noter. Concernant « l’instinct de tueur » du loup tout d’abord. S’il est vrai que le loup peut parfois commettre des dégâts importants lorsqu’un troupeau est affolé, c’est loin d’être une généralité. Le loup tue bien pour se nourrir et pas par jeu. Le loup serait aussi « une espèce pas forcément utile selon certains biologistes ». Voilà justement une curieuse phrase pour des biologistes. Il y a longtemps que ceux-ci ne parlent plus d’espèces utiles ou nuisibles mais de proies ou de prédateurs, de carnivores ou d’herbivores. Les chasseurs ne l’ont pas oublié puisqu’ils disent remplacer les grands prédateurs absents. D’autre part, plusieurs thèmes importants ne sont même pas abordés. Par exemple, si on ne peut pas nier également que le loup tue des brebis, les abattages de troupeaux suite à des présomptions de maladies, la foudre, les accidents de montagne divers et les dégâts des chiens divagants représentent la majeure partie de la mortalité. Le reportage n’y faisant aucune allusion, il entache du même coup son objectivité la plus élémentaire.
Concernant les moyens de protection, on n’entend pas dire que leur utilisation limite le nombre d’attaques et réduit fortement le nombre d’animaux tués lors d’une attaque. Par ailleurs, les images en vision nocturne tournées dans le parc du Mercantour et choisies pour le reportage ne montrent qu’une certaine partie du film et « les Crocs de la colère » oublie celles pendant lesquelles les chiens de protection empêchent les loups de faire des victimes ; à ce propos, si la capture et « la mise à mort » d’une brebis ne prend que quelques minutes, c’est pendant la nuit entière que les loups vont tenter d’attaquer et seront sans cesse repoussés par les patous.
Quant à la concurrence économique étrangère, elle est simplement mentionnée alors que la filière ovine française subit elle-même une crise économique grave dans laquelle le loup n’est pour rien.
On se félicitera néanmoins que le reportage expose le retour naturel du loup depuis l’Italie, les moyens de protection aidés par l’Etat, le caractère craintif de l’animal, le « coût exorbitant » des tirs de loup, les différences de conditions de travail en France et en Italie, les propos de Luigi Boitani qui critique la gestion du dossier par l’état français et ses tirs inutiles et surtout politiques et le commentaire concernant l’absence d’ « une vraie politique pour accompagner le retour du loup ». Sans parler évidemment de l’alternative à la « guerre du loup » avec la présentation des bénévoles du programme Pastoraloup de l’association FERUS.
Pour terminer, FERUS, comme il le dénonce depuis des années, s’insurge contre la réalité du braconnage et la battue soi-disant organisée par un groupe d’éleveurs, ce que nous n’oublierons pas de mentionner lors du prochain groupe national loup piloté par l’Etat (ministères de l’Ecologie et de l’Agriculture).
FERUS a adressé cette réaction à la rédaction d’Envoyé Spécial.