Communiqué des associations FERUS / Pays de l’Ours-ADET, 19 avril 2019
Pyrénées : NON à l’effarouchement des ours !
Le ministre de l’Agriculture vient d’annoncer que des mesures d’effarouchement contre l’ours seront déployées incessamment sur les estives pyrénéennes, comportant entre-autres des tirs à balle plastique.
Ces mesures sont inadéquates, inutiles, contre-productives, et de plus illégales.
Elles s’appliquent envers une des trois seules espèces de mammifère en danger critique d’extinction en France, et alors que la très grande majorité des groupements pastoraux touchés par la prédation n’a pas mis en place des moyens de protection adaptés. Cet état de fait a été souligné dans le rapport des inspecteurs de l’Etat en Ariège l’an dernier.
Rappelons que l’effarouchement des ours est la mission des chiens de protection. Présents 24H sur 24 auprès des troupeaux, ils l’accomplissent avec une efficacité exemplaire, pour un coût réduit.
Les méthodes de protection financées par l’Etat, sont le seul moyen de réduire les pertes, à condition qu’elles soient correctement appliquées : embauche de bergers + regroupement nocturne du troupeau + chiens de protection, avec une conduite groupée en journée.
Pour preuve, les quelques estives s’étant équipées en adéquation avec leur taille de troupeau (3 chiens pour 450 bêtes pour l’une, 5 chiens pour 1 600 bêtes pour l’autre, etc.) ont eu des pertes faibles, stables ou en baisse en 2018, voire aucune prédation depuis deux ans pour l’une d’elle.
A contrario, les estives voisines refusant les protections depuis 20 ans, et pratiquant le « ranching à l’américaine », parfois avec plus de 2 000 bêtes, ont vu l’année passée les pertes les plus importantes.
Quant à l’estive d’Arréou, citée régulièrement par les opposants comme exemple d’inefficacité des moyens de protection, l’augmentation des dégâts constatés s’explique par le doublement du troupeau entre 2016 et 2017, sans adaptation des moyens de protection, notamment du nombre de chiens de protection. Cette cause d’augmentation des dégâts est explicitement mentionnée dans le rapport des inspecteurs généraux.
Les mesures d’effarouchement envisagées par le ministère s’avèreront donc :
- Inadéquates : le coût qu’elles représentent sont « la version de luxe » des chiens de protection. Le personnel impliqué va vite s’épuiser en gardes de nuit alors que les chiens sont présents en permanence. La Pastorale Pyrénéenne elle-même remarque que certains groupements pastoraux abusent de l’utilisation de ses bergers d’appui pour des gardes nocturnes, alors qu’ils n’ont pas la volonté de s’équiper correctement en chiens de protection.
- Inutiles : le personnel mobilisé ne pourra être partout en permanence. Les prédations se reporteront sur les estives mal équipées voisines.
- Contre-productives : elles donnent des gages aux groupements pastoraux qui refusent de s’équiper correctement depuis 20 ans, et dévalorisent le travail de la Pastorale Pyrénéenne et de ceux qui obtiennent de bons résultats en utilisant les bonnes méthodes. Elles font passer l’ours pour un prédateur spécialisé alors qu’il n’est qu’un opportuniste mettant à profit les ressources accessibles, compromettant en cela l’objectif affiché d’une coexistence apaisée avec l’élevage de montagne.
- Illégales : l’ours brun bénéficie d’un statut de protection particulier au niveau européen. Les interventions de type effarouchement ne sont possibles, à titre dérogatoire, qu’à la condition « qu’il n’y ait pas d’autre solution, et que cela ne nuise pas à la conservation de l’espèce » (Cf. article 15 de la Directive habitats, Faune, Flore »). Ces mesures sont déjà prévues dans le protocole « ours à problème », en vigueur depuis plusieurs années, et validé par des experts internationaux. Ce dernier est mobilisable en cas d’ours ayant un comportement anormal avéré, alors que les moyens de protection, correctement appliqués, se seraient montrés inefficaces. En l’occurrence, aucun ours n’a eu de comportement de prédation anormal ces dernières années, et les dégâts se concentrent sur des estives non-protégées. L’effarouchement dans ces conditions serait clairement illégal et nos associations étudieront toute possibilité de contester de telles décisions devant les tribunaux.
Nous demandons donc instamment au Gouvernement de renoncer à l’effarouchement des ours et de concentrer ses moyens sur la généralisation de la protection des troupeaux, seule mesure permettant à terme une cohabitation apaisée et sereine pour tous.