Espoir pour l’ours marsicain
Excellente nouvelle pour le Parc national des Abruzzes, Latium et Molise en Italie qui fête cette année son 90ième anniversaire : après des années difficiles marquées, on s’en souvient, par un grand nombre d’empoisonnements et d’accidents tragiques, ce ne sont pas moins de 8 oursons marsicains qui ont été repérés cette année dans les Abruzzes (issus de 3 portées). Les oursons dont on ne connaît pas encore le sexe semblent à ce jour tous en bonne santé. A ce chiffre encourageant, il conviendrait d’ajouter 3 autres naissances repérées en Molise (1 portée), même si la bonne nouvelle n’a pas pu encore être confirmée de façon certaine. Ce serait donc au total potentiellement 11 oursons qui seraient nés en 2012, un chiffre record ! On peut d’autant plus s’en réjouir que l’année 2011 avait été marquée par un creux historique avec un nombre de naissances dramatiquement bas (3 naissances seulement).
Il ne subsisterait qu’une quarantaine d’ours marsicains (40 à 43 au dernier recensement avant les naissances de cette année) contre une centaine il y a encore quelques décennies. Depuis les années 1970, certains spécialistes évoquent le chiffre d’une centaine d’ours morts par le fait de l’homme. Au cours des 40 dernières années, de 1970 à 2010, on estime qu’environ 25 ours ont trouvé la mort chaque décennie suite à des causes humaines directes ou indirectes (braconnage, collision routière ou ferroviaire, empoisonnement, noyade). Bon an, mal an, il semblerait y avoir tout juste autant de naissances que de décès. Du fait d’une extrême consanguinité, d’une trop faible reproduction, d’une mortalité importante de 50% des juvéniles et d’un territoire restreint, les ours marsicains figurent parmi les ours les plus menacés d’Europe. Pour mémoire, la très faible variation génétique de l’ours marsicain est consécutive de son isolement lui-même lié au déclin inexorable de ses effectifs dans la botte italienne. L’isolement de cette population, marquée par des individus de petite taille et d’un faible poids, a d’ailleurs entraîné chez ceux-ci certaines particularités génétiques justifiant la création en 1921 de la sous-espèce Ursus arctos marsicanus. Certains auteurs préfèrent parler d’une variation géographique due à un goulot génétique. Quoi qu’il en soit, avec un poids maximal de 200 kg pour les mâles et de 150 kg pour les femelles, l’ours marsicain est plus petit que son cousin alpin avec un rapport longueur/largeur différent, tandis que sa couleur tire sur l’argenté derrière la tête. Son régime alimentaire est également végétarien à 80%.
Malgré l’espoir que suscitent ces nouvelles naissances et le statut de protection dont fait l’objet l’animal emblématique du parc national, sa survie n’est pour autant absolument pas assurée. Par ailleurs, la vague d’empoissonnement déplorée ces dernières années semble remettre en cause une acceptation jusqu’à ce jour harmonieuse par les populations locales. De plus, le parc et ses alentours font actuellement l’objet de vastes projets immobiliers et touristiques. Or dans ses limites actuelles (50 000 hectares pour la zone centrale), le parc national est à l’étroit et ne peut abriter que 80 ours environ, soit moitié moins que le nombre minimum requis pour assurer un avenir à moyen terme à cette sous-espèce. Les scientifiques tentent de convaincre les autorités d’étendre le périmètre de protection : d’une part, en classant la zone périphérique (80.000 hectares) en réserve naturelle, d’autre part, en aménageant des corridors de circulation protégés reliant les Abruzzes aux deux parcs nationaux voisins (Gran Sasso et de la Marjella), le long de la chaîne des Apennins. A suivre…
Stéphane Nataf pour FERUS