OUI, le milieu pyrénéen est encore très favorable à l’ours !
Par Christian Arthur
Article paru dans la Gazette des grands prédateurs n°49 (août 2013)
Dans son numéro 297, paru en décembre 2012, le bulletin mensuel de l’ONCFS publie un article de Martin, Decaluwe et Quenette traitant d »Une estimation de la qualité des habitats pour l’ours brun dans les Pyrénées – Intérêts pour la gestion« . Dans cet article de vulgarisation, condensé de deux articles scientifiques, les auteurs partent du constat que « la gestion et la conservation de cette population (d’ours) reposent sur des aspects à la fois économiques, sociaux et écologiques. En particulier, la détermination de la qualité des habitats disponibles pour cette population constitue un outil important, d’autant plus dans un contexte où l’activité humaine continue de se développer, parfois au détriment des habitats naturels. » Ce constat fait, les auteurs présentent la façon dont ils ont procédé pour cette cartographie : utilisation d’un modèle d’habitat développé dans les Monts Cantabriques, développement d’un modèle de niche écologique issu des données pyrénéennes. Puis, ils montrent la bonne adaptation du modèle Cantabriques aux Pyrénées, enchaînent sur la présence d’habitats de bonne qualité dans les Pyrénées, puis sur la question « comment gérer les différents types d’habitats ? ». Après avoir constaté la bonne adéquation du modèle de niche écologique à l’échelle locale pyrénéenne, ils concluent sur les implications de cette analyse sur la taille de population d’ours que les Pyrénées pourraient accueillir (110 environ), sur l’utilisation potentielle de cette cartographie pour décider de futurs sites de relâcher (en limite de noyaux déjà existants et surtout des femelles dans la partie ouest du noyau central pour connecter le noyau central et le noyau occidental) et enfin sur le choix de la stratégie de gestion de l’ours (privilégier la tranquillité des animaux dans les habitats stratégiques).
Au-delà de son intérêt –réel- pour la connaissance et la réflexion pour la conservation de l’ours, cet article appelle quelques commentaires, qu’il convient de replacer tout d’abord dans le contexte scientifique plus large de l’analyse de la qualité de l’habitat d’une espèce, ainsi que de s’interroger sur la méthode utilisée, et ce, avant même de prendre en considération les intérêts pour la gestion énoncés à la fin de cet article.
Analyser la qualité de l’habitat pour une espèce : un concept récent en écologie et une opération pas toujours aisée… révélatrice de la philosophie « naturelle » des chercheurs.
Pour les gestionnaires de terrain qui sont souvent confrontés à la résolution des problèmes liés à la cohabitation entre une espèce et des activités humaines, la question de la qualité de l’habitat disponible pour cette espèce se pose de façon récurrente : « le milieu permet-il à l’espèce de vivre et se développer ? », « quelles modifications de ce milieu peut-on accepter sans nuire à l’espèce, ou doit-on favoriser pour améliorer son statut ? » ou encore « quelles activités et utilisation humaine peuvent être pratiquées sans faire fuir l’espèce ? ». Pour essayer de répondre à ces questions, tout un pan de l’écologie comportementale s’est développé ces 30 dernières années, regroupé sous la notion de « sélection de l’habitat ».
Si, au début de la réflexion, tous les travaux ont porté quasi exclusivement sur la sélection biologique de l’habitat et la seule prise en compte des facteurs physiques, écologiques et éthologiques, l’émergence de la biologie de la conservation dans les années 1980 a conduit à inclure l’impact anthropique dans la sélection de l’habitat en prenant en considération tant les infrastructures que les activités humaines in situ ou dans les environs. L’écologie du paysage est venue par la suite compléter la réflexion en introduisant les notions de surface minimale d’habitat nécessaire, de matrice (composante fondamentale de l’habitat pour permettre la présence d’une espèce et qui constitue l’essentiel de son domaine vital), mais aussi celle de connectivité, tant entre les diverses composantes du domaine vital (possibilité pour l’animal d’utiliser sans problèmes ni déplacements excessifs toutes les facettes de son habitat) qu’entre les différents noyaux de population (dispersion et échanges entre noyaux de population). En France, les politiques récentes Trames Verte et Bleue sont un essai de déclinaison administrative de ce dernier type de réflexion.
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Photo : Castanet-Hervieu