En 2008, un canidé vivant à proximité du chacal doré sénégalais et présentant des caractéristiques morphologiques et comportementales très différentes de ce dernier a été repéré et photographié. Cette découverte a suscité de nombreuses réactions et requêtes de la part de la communauté scientifique désireuse de lever certaines interrogations d’ordres taxonomiques et phylogénétiques concernant l’identification, la répartition et le statut de conservation de ce taxon parmi les canidés africains. Sollicitée par Cécile Bloch, l’association SYLVATROP a souhaité soutenir son initiative et valoriser sa découverte. Cet article résume en quelques lignes le contenu de l’étude réalisée.
Re-découverte » du loup africain Canis lupus lupaster au Nord et à l’Ouest de l’Afrique : une répartition africaine de plus de 6 000 km
La découverte récente, en 2011, d’une lignée du loup gris dans le Nord Est de l’Afrique suggère la présence encore mystérieuse d’un canidé sur le continent : le loup africain Canis lupus lupaster. Cette année, une étude réalisée en collaboration avec Philippe Gaubert, chargé de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), a été menée afin de redéfinir la répartition actuelle du loup africain, ainsi que ses caractéristiques génétiques et démographiques. Pour ce faire, des échantillons de canidés ont été récoltés en Afrique du Nord et de l’Ouest, et une partie de leur ADN mitochondrial (maternellement hérité) a été séquencée. Cette étude devait également permettre de déterminer les délimitations taxonomiques entre Canis lupus lupaster et le chacal doré C. aureus, avec lequel il était jusque-là assimilé.
Grâce à cette étude, quatre lignées mitochondriales de loups gris, correspondant à des sous-espèces, ont pu être délimitées, parmi lesquelles C. lupus/ familiaris (loups holarctiques et chiens domestiques), C. l. pallipes (loup indien), C. l. chanco (loup du Tibet) et C. l. lupaster (loup africain). Des procédures d’assignement taxonomique basées sur les séquences d’ADN mitochondrial ont permis d’identifier les canidés provenant d’Algérie, du Mali et du Sénégal comme appartenant à C. I. lupaster, ce qui étend son aire de répartition connue de 6000 km à l’ouest. Les analyses génétiques ont également permis d’estimer que le loup africain présentait le niveau le plus élevé de diversité génétique au sein de l’espèce C. lupus, que l’âge géologique de la lignée était similaire à celui des loups holarctiques (Pléistocène), et que la taille efficace des populations femelles était d’environ 80 000 individus.
Les résultats obtenus suggèrent que le loup africain représente une lignée endémique à l’Afrique dont les effectifs sont probablement restés stables au cours du temps, tout-au-moins jusqu’à la période actuelle.
Les observations de terrains, encore inédites, menées par Cécile Bloch au Sénégal, nous ont permis de dresser un premier diagnostic morphologique et comportemental du loup africain. Ces éléments le distinguent clairement du canidé sympatrique qu’est le chacal doré. Cependant, la détection de séquences d’ADN mitochondrial de C. I. lupaster chez C. aureus au Sénégal, suggère de possibles évènements d’hybridation entre les deux canidés.
Eu égard aux préjudices subis par les populations de canidés à travers le continent africain, il est urgent de caractériser le statut de conservation des populations de Canis lupus lupaster, et de redéfinir les délimitations taxonomiques entre le loup africain et le chacal doré.
L’étude en entier (et en anglais!) –>ICI
Le blog de Cécile Bloch a qui l’on doit ces superbes et inédites photographies de loup africain : Vie Sauvage
Lire aussi :
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– Découverte scientifique : le chacal égyptien est en fait un loup gris (février 2011)