FERUS a pour but, en France, notamment dans les massifs frontaliers et en relation avec les pays européens voisins de favoriser le retour et le maintien des populations de lynx.
Alors que l’ours et le loup occupent régulièrement le devant de la scène nationale, le lynx se fait oublier. Malgré un impact limité sur les activités humaines, des signes de mécontentement sont parfois observés au niveau local. Son arrivée dans le Jura à la fin des années 1980 n’a pas été très sereine.
Le lynx en France : de sa disparition à son retour
Sur la Liste rouge des espèces menacées en France de l’IUCN (2017) , le lynx boréal est classé « en danger ».
Au XVème siècle, le lynx boréal était partout en France, en plaine comme en montagne. Puis le déboisement, la diminution des populations de ses proies et la chasse l’ont cantonné dans les massifs montagneux. Au milieu du XVIIème siècle, le lynx disparaît des Vosges. A la fin du XIXème siècle, il s’éteint du Jura et du massif Central. Le félin résiste un peu plus longtemps dans les Alpes (un lynx tué en 1928 dans le Queyras). Dans les Pyrénées, la dernière capture authentifiée date de 1917 (Pyrénées-Orientales).
Le retour du lynx
Au début des années 1970, depuis la Suisse toute proche où une vingtaine de lynx a été relâchée, l’espèce fait son retour sur le versant français du Jura. Dès lors, elle va progressivement coloniser l’ensemble des secteurs forestiers favorables du massif du Jura.
La réintroduction du lynx dans les Vosges débute en 1983. En 10 ans, 21 lynx, provenant en grande partie des Carpates slovaques, ont été relâchés dans les Vosges du Sud. Sur ces 21 lynx réintroduits, seule une dizaine de lynx ont pu participer réellement à la constitution d’une population ; les autres sont morts rapidement ou ont disparu de façon suspecte.
Dans les Alpes Occidentales, près d’une quinzaine de lynx ont été lâchés en Suisse de 1970 à 1976. En France, une première donnée est collectée en Isère en 1976. Par la suite, les premiers indices sérieux de sa présence datent du début des années 1980. Maintenant encore, on ne peut pas affirmer avec certitude si ces lynx sont venus du sud du Jura ou des Alpes suisses. D’abord uniquement présente dans les Alpes du Nord, l’espèce a colonisé progressivement des territoires vers le sud, jusqu’en Haute-Provence sans pour autant former une population viable actuellement.
La population actuelle
Les dernières infos de l’OFB sur la présence du Lynx
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Après plusieurs années sans avoir communiqué des informations centralisées sur le suivi du Lynx boréal en France, l’OFB (Office Français de la Biodiversité) a publié récemment son « Lynx Flash infos » N°12. Les données les plus récentes ne sont toutefois pas d’une très grande fraicheur, car elles concernent une période de 3 années entre Avril 2020 et Mars 2023.
Comme lors des communications précédentes, les données sont issues des remontées du réseau Loup-Lynx composé de bénévoles fréquentant assidument les espaces naturels et ayant reçu une formation spécifique pour apprendre à reconnaître les indices de présence des 2 espèces.
Il y a notamment dans ce Flash infos la carte ci-jointe établie par l’OFB sur les indices de présence détectés pendant 3 ans :
Même s’il n’y a rien de très nouveau dans ce document intéressant, nous vous encourageons à aller le consulter en détails avec le lien : https://professionnels.ofb.fr/fr/doc/lynx-flash-info-ndeg12
Les principaux enseignements que l’on peut en tirer sont les suivants :
- L’aire de présence est estimée à 15800 km², en progression de 5000 km² depuis 3 ans.
- Avec 11000 km², le massif du Jura représente l’essentiel de la présence du lynx et de l’augmentation constatée, ce massif semble complètement colonisé dans les zones favorables, mais les risques de consanguinité y sont soulignés.
- La présence régulière dans les Alpes reste fragile et cantonnée à 3 massifs : la Chartreuse et les Bauges avec une connexion depuis le Jura, ainsi que le Chablais où la connexion est possible avec le Jura, mais semble peut-être plus facile depuis les Alpes suisses.
- Le massif des Vosges est de nouveau en augmentation avec quelques individus provenant du Palatinat allemand, mais reste très fragile et doit être surveillé avec attention.
- L’arrivée de quelques lynx plus à l’ouest, notamment en Bourgogne, Beaujolais, Morvan, se confirme, et un front de colonisation semble s’installer même s’il s’agit d’individus isolés, et ces zones devront également faire l’objet d’une surveillance renforcée.
Ces données confirment donc une augmentation de l’aire de présence du lynx par rapport à la période précédente, ce qui est une nouvelle encourageante. Mais elles ne nous donnent toujours aucune estimation d’effectifs. Cela est bien dommage et nous laisse toujours dans le flou lorsque l’on communique auprès du grand public et des médias qui nous demandent des chiffres de population, et que l’on cite une population estimée entre 150 et 200 individus.
On espère être proche de la vérité, et ce faible nombre nous permet de rappeler à chaque fois qu’il s’agit d’une population « En danger », toujours sur la liste rouge de l’UICN pour la France, et qui fait l’objet d’un Plan National d’Actions sur la période 2022-2026, dont le détail peut être consulté avec le lien : www.plan-actions-lynx.fr
Un animal protégé mais menacé
Le lynx est une espèce protégée au niveau national et au niveau européen (Directive Habitats). Sur la Liste rouge de l’UICN, il est classé « en danger ».
Les menaces
La population de lynx en France est très vulnérable compte tenu de son faible effectif et de sa fragmentation. Généralement, en plus de la mortalité naturelle, une mortalité d’origine humaine peut devenir préjudiciable à la survie d’une population.
Actuellement, les collisions routières, autoroutières et ferroviaires représentent la cause de mortalité la plus connue. Les juvéniles payent un plus lourd tribut que les lynx adultes. En France, le braconnage est une cause de mortalité importante. Trop régulièrement, des lynx sont ainsi tués par ignorance ou vengeance, principalement dans le Jura et les Vosges. Un problème plus général et plus vaste concerne l’ensemble des populations de lynx boréal d’Europe occidentale. Il s’agit de la fragmentation des habitats forestiers par des zones urbanisées et leurs infrastructures (routes, voies ferrées, canaux…). Les possibilités de dispersion, donc d’échanges d’individus entre noyaux de population se trouvent réduites voire impossibles. A terme, ces isolements peuvent entraîner un affaiblissement génétique de la population, d’autant que les noyaux de nos régions sont issus d’opérations de réintroduction, donc d’un faible nombre d’individus fondateurs.
Perspectives
Le lynx boréal est implanté sur toute la façade Est de la France. Mais à l’échelle européenne, les populations de lynx sont très fragmentées et donc très vulnérables.
Il est nécessaire de favoriser des échanges d’individus entre chacun de ces noyaux (Vosges/Palatinat, Jura, Alpes occidentales, Alpes orientales, Balkans…) afin d’optimiser la variabilité génétique de la population et sa survie à long terme.
Pour cela, il est nécessaire de créer des passages à faune efficaces au-dessus des voies de communication les plus problématiques (autoroutes, voies rapides). En France, cela devient crucial au niveau de l’autoroute A4, au col de Saverne (Bas-Rhin), qui relie les Vosges du Nord et les Vosges Moyennes.
Nous devons veiller au maintien de la protection de l’espèce que certains cherchent à affaiblir. Une régulation n’est et ne sera jamais à l’ordre du jour, compte tenu de la biologie de l’espèce et de l’état de ses populations.
Enfin, il faut continuer le travail d’information sur le lynx boréal pour mieux faire connaître cette espèce et ses impacts réels sur les activités humaines. Ceci permettra sans doute aussi de faire accepter ce beau félin, si mal connu et si passionnant.
Que faire en cas d’observation d’un lynx ou d’un indice de présence ?
Si vous observez un lynx ou un de ses indices de présence (piste, proie, crotte…), informez-en FERUS (contact@ ferus.fr) ou l’Observatoire des Carnivores Sauvages (ocs.asso@gmail.com)
Plan d’Actions pour la Conservation du Lynx boréal (Lynx lynx) en France
WWF / SFEPM (2019)
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